
Georges A. Romero : archives de l’horreur à l’Université de Pittsburg
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Publié le 9 novembre 2025 par
Plongée dans les boîtes du père des zombies de cinéma à l’Université de Pittsburg, dont les archives, ouvertes à la consultation, ont vocation à devenir un centre d’études du genre horrifique.
Sur le campus de l’Université de Pittsburgh, à deux pas de la monumentale « Cathedral of Learning » où se déroulent les cours, se trouve une petite galerie dans le bâtiment de la bibliothèque Hillman. Un masque de zombie, le matériel promotionnel de The Blair Witch Project (1999), les badges multicolores collectionnés par George A. Romero au gré des festivals… Benjamin Rubin, coordinateur du fonds d’archives consacré à l’horreur en littérature et au cinéma, explique : « Il s’agit des plus beaux éléments de nos archives, choisis une fois par an par nos étudiants en muséographie ou en histoire de l’art en fonction de nos acquisitions. »
L’archiviste raconte qu’avant de se diversifier la collection s’est constituée en 2019 autour du don d’une centaine de boîtes par l’épouse, la fille et le producteur de Romero à partir d’Incidents de parcours, Peter Grunwald : « La plupart d’entre elles sont pleines de papiers ; cela déçoit souvent les fans qui s’adressent à nous. Il ne s’agit pas d’un ensemble d’accessoires, mais d’un fonds universitaire qui permet aux chercheurs de reconstituer la genèse créative de l’oeuvre de Romero avec ses brouillons annotés, sa centaine de scénarios non réalisés et plus ou moins aboutis, les documents liés à la production ou à la distribution de ses films. »
Quelques lettres de John Carpenter, Stephen King ou des Wachowski au moment de la sortie de Matrix évoquent des projets qui n’ont jamais vu le jour ; des story-boards, comme celui du Territoire des morts tourné à Pittsburgh, dessiné par Rob McCallum, complètent l’ensemble. « Nous avons beaucoup de matériel autour de ce film, confirme Rubin. En consultant les versions du scénario qui datent de juillet et août 2001, on apprend qu’il devait se terminer par l’explosion du gratte-ciel dans lequel les riches sont confinés. Rien n’est écrit explicitement, mais il est évident qu’après le 11 Septembre il est devenu impossible de filmer une telle séquence. Comparer les différentes versions d’un scénario nous éclaire autant sur un artiste au travail que sur l’histoire culturelle des États-Unis. »

Une fois accomplis l’inventaire et la classification, une partie du travail de Benjamin Rubin consiste à acquérir de nouveaux documents : par exemple certains scénarios de Wes Craven, de John Carpenter, une version précoce de celui des Dents de la mer, ou les archives du premier festival de cinéma aux États-Unis consacré aux films de genre réalisés par des femmes, fondé par Heidi Honeycutt (Etheria Film Festival). « Je veille à ce que toute la diversité de l’horreur soit représentée. C’est surtout du côté de la littérature que la collection s’étoffe, en partenariat avec l’Horror Writers Association dont je suis membre. »
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Six ans après sa création, les premiers ouvrages écrits à partir de la collection commencent à paraître, à l’instar de Raising the Dead d’Adam Charles Hart, ancien étudiant de l’Université de Pittsburgh qui a participé au tri des archives à leur arrivée. « Dès le départ, nous voulions travailler en étroite collaboration avec les enseignants. Nous recevons chaque semestre des étudiants, qui peuvent consulter ce qu’ils souhaitent pour leurs travaux », précise Rubin.
À terme, l’objectif est de créer un centre de recherches géré par l’université autour de l’horreur, qui pourrait accueillir et aider financièrement étudiants et chercheurs. Autre projet : la création d’un musée Romero, pour faire place à la dimension pop-culturelle de l’héritage du réalisateur. « À Pittsburgh, on peut encore aller visiter le cimetière où a été tournée la scène d’ouverture de La Nuit des morts-vivants, ou le centre commercial de Zombie », explique l’archiviste. Pittsburgh pourrait devenir un lieu incontournable de l’horreur pour des publics très différents, mais il faut pour cela beaucoup d’investissements. Nous n’en sommes encore qu’au début.
Mathilde Grasset
Anciens Numéros



