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Karlovy Vary : le monde dans un grain de sable

Sand City de Mahde Hasan (2025).

Karlovy Vary : le monde dans un grain de sable

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Publié le 15 septembre 2025 par Ariel Schweitzer

FESTIVAL. Début juillet, la 59ᵉ édition du festival de Karlovy Vary a mis en avant des œuvres célébrant la poésie urbaine.

« Une chose ratée, si tu la changes déplace, peut être une chose réussie. » Cet aphorisme de Robert Bresson est cité dans The Luminous Life, premier long métrage du jeune Portugais João Rosas, l’une des révélations de la dernière édition du festival tchèque injustement ignorée par le jury de la compétition internationale. Les Notes sur le cinématographe, évoquées à plusieurs reprises, n’y font pas seulement office d’hommage, elles commentent le quotidien du protagoniste, un jeune musicien qui oscille sentimentalement et déambule dans Lisbonne.

La grande ville est aussi au cœur de la deuxième découverte de cette édition, le bangladais Sand City, lauréat de la compétition Proxima consacrée aux premières œuvres. Réalisé par l’autodidacte Mahde Hasan, cette sorte de « symphonie d’une grande ville » montre une Dhaka couverte de fumée, de sable et de poussière, théâtre d’un chassé- croisé entre un homme et une femme solitaires qui travaillent dans la même usine mais ne se connaissent pas. « Je voudrais voir le monde dans un grain de sable… Tenir l’infini dans la paume de ma main » : l’exergue de William Blake reflète l’ambition du film de relier le portrait individuel et collectif, l’intime et la critique sociale.

Comme l’année dernière, le grand prix du festival, le Crystal Globe, a été décerné à un documentaire : Better Go Mad in the Wild de Miro Remo, une coproduction tchéco-slovaque sur deux jumeaux, anciens révolutionnaires, qui décident, l’âge venant, de ne plus sortir de leur petit village. Ils défient le capitalisme global en travaillant leur terre tout nus. Ce film étrange, non dénué de charme, a la force et les limites de sa modestie.

Cette édition était la première sans Jiri Bartoska, président mythique du festival depuis 1994, décédé en mai. Après la Révolution de Velours, il avait réussi à dégager le festival de la tutelle soviétique et russe (de 1959 à 1993, l’événement se tenait en alternance entre Moscou et Karlovy Vary), sans renoncer à sa mission première : révéler les talents des pays de l’Est.

Ariel Schweitzer

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