
Le Fifib consolé par Bouchra
ActualitésFestival International du Film Indépendant de Bordeaux
Publié le 10 novembre 2025 par
Du 7 au 12 octobre s’est tenue la 14E édition du Festival international du film indépendant de Bordeaux, célébration d’un cinéma modique mais persévérant.
Chambre d’écho d’un cri universellement poussé et annonçant au mieux la catastrophe, au pire la fin du monde, cette édition du festival de Bordeaux a présenté une fois encore des films aux formes très diverses. Avec en ligne de mire une question toujours plus actuelle : comment le cinéma indépendant peut-il s’exprimer depuis l’entonnoir dans lequel il semble pris, comment peut-il retourner en force la fragilité de sa fabrication ? Les réponses les plus urgentes venaient de territoires en crise : le Liban (Un monde fragile et merveilleux de Cyril Aris, Manal Issa d’Elisabeth Subrin), l’Algérie (Roqia de Yanis Koussim) et, bien sûr, la Palestine.

Gaza était au cœur d’une carte blanche programmée par la chercheuse Lola Maupas, de la rétrospective consacrée à la cinéaste Annemarie Jacir (Le Sel de la mer) et du troublant With Hasan in Gaza de Kamal Aljafari (évoqué dans notre compte rendu des États généraux du film documentaire de Lussas, lire Cahiers no 824), montage de found footage de 2001 par lequel la dévastation actuelle est d’autant plus présente à l’esprit.
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La cinéaste guadeloupéenne Malaury Eloi Paisley, autrice du très beau portrait de Pointe-à-Pitre par quelques habitants de ses marges, L’Homme-Vertige, proposait un « Regard sur le cinéma caribéen ». L’occasion de voir en salle De cierta manera de Sara Gómez, œuvre emblématique du cinéma cubain des années 1970. Ce film de crises multiples (au travail, dans les rapports de genres et de classes postrévolutionnaires), peut sembler pessimiste sur le fond, mais est résolument optimiste par sa forme, qui se permet toutes les ruptures avec un enthousiasme bouleversant.
Le Grand Prix de la compétition, Bouchra d’Orian Barki et Meriem Bennani, explore une crise identitaire intime, celle d’une jeune cinéaste marocaine vivant à New York ; sa mère et son pays d’origine la tiennent, elle et son homosexualité, à une distance dont le film raconte la patiente résorption. Les enjeux autofictifs de ce trajet sont déplacés et sublimés par une animation splendide et très sensuelle, qui sera finalement parvenue à consoler un peu.
Louis Séguin
Anciens Numéros



